Saturday, August 05, 2017

 

Nature

Charles Baudelaire (1821-1867), "The Painter of Modern Life," XI (tr. P.E. Charvet; I changed "natures teaches" to "nature teaches"):
Most wrong ideas about beauty derive from the false notion the eighteenth century had about ethics. In those days, Nature was taken as a basis, source and prototype of all possible forms of good and beauty. The rejection of original sin is in no small measure responsible for the general blindness of those days. If, however, we are prepared merely to consult the facts that stare us in the face, the experience of all ages, and the Gazette des Tribunaux, we can see at once that nature teaches nothing or nearly nothing; in other words, it compels man to sleep, drink, eat and to protect himself as best he can against the inclemencies of the weather. It is nature too that drives man to kill his fellow-man, to eat him, to imprison and torture him; for as soon as we move from the order of necessities and needs to that of luxury and pleasures, we see that nature can do nothing but counsel crime. It is this so-called infallible nature that has produced parricide and cannibalism, and a thousand other abominations, which modesty and nice feeling alike prevent our mentioning. It is philosophy (I am referring to the right kind), it is religion that enjoins upon us to succour our poor and enfeebled parents. Nature (which is nothing but the inner voice of self-interest) tells us to knock them on the head. Review, analyse everything that is natural, all the actions and desires of absolutely natural man: you will find nothing that is not horrible. Everything that is beautiful and noble is the product of reason and calculation. Crime, which the human animal took a fancy to in his mother's womb, is by origin natural. Virtue, on the other hand, is artificial, supernatural, since in every age and nation gods and prophets have been necessary to teach it to bestialized humanity, and since man by himself would have been powerless to discover it. Evil is done without effort, naturally, it is the working of fate; good is always the product of an art.

La plupart des erreurs relatives au beau naissent de la fausse conception du XVIIIe siècle relative à la morale. La nature fut prise dans ce temps-là comme base, source et type de tout bien et de tout beau possibles. La négation du péché originel ne fut pas pour peu de chose dans l'aveuglement général de cette époque. Si toutefois nous consentons à en référer simplement au fait visible, à l’expérience de tous les âges et à la Gazette des Tribunaux, nous verrons que la nature n'enseigne rien, ou presque rien, c'est-à-dire qu'elle contraint l'homme à dormir, à boire, à manger, et à se garantir, tant bien que mal, contre les hostilités de l'atmosphère. C'est elle aussi qui pousse l'homme à tuer son semblable, à le manger, à le séquestrer, à le torturer; car, sitôt que nous sortons de l'ordre des nécessités et des besoins pour entrer dans celui du luxe et des plaisirs, nous voyons que la nature ne peut conseiller que le crime. C'est cette infaillible nature qui a créé le parricide et l'anthropophagie, et mille autres abominations que la pudeur et la délicatesse nous empêchent de nommer. C'est la philosophie (je parle de la bonne), c'est la religion qui nous ordonne de nourrir des parents pauvres et infirmes. La nature (qui n'est pas autre chose que la voix de notre intérêt) nous commande de les assommer. Passez en revue, analysez tout ce qui est naturel, toutes les actions et les désirs du pur homme naturel, vous ne trouverez rien que d'affreux. Tout ce qui est beau et noble est le résultat de la raison et du calcul. Le crime, dont l'animal humain a puisé le goût dans le ventre de sa mère, est originellement naturel. La vertu, au contraire, est artificielle, surnaturelle, puisqu'il a fallu, dans tous les temps et chez toutes les nations, des dieux et des prophètes pour l'enseigner à l'humanité animalisée, et que l'homme, seul, eût été impuissant à la découvrir. Le mal se fait sans effort, naturellement, par fatalité; le bien est toujours le produit d'un art.



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